Rentrée des vacances et pensées matinales.

Le mois de décembre s'était étendu jusqu'à garantir à toute l'Angleterre de vastes étendues de neige pour la nouvelle année. Après des vacances scolaires inhabituelles, la belle Victoire était docilement montée à bord du Poudlard Express, regardant sans trop le voir le paysage encore blanc qui s'étendait de part et d'autre des rails, à perte de vue. Elle n'avait pas trouvé Abigaël et était restée seule tout le long du trajet, néanmoins soulagée qu'aucun de ces gamins braillards de Première Année ne soit venu lui pourrir son voyage. Une fois arrivée au château, la jeune fille s'était directement dirigée vers son dortoir, négligeant de se présenter à un repas dont elle n'avait de toute manière aucune envie.
En ce lundi matin enneigé, dont la fraîcheur s'était bien fait sentir malgré les épaisses couvertures que les Elfes avaient pris soin de poser sur les lits des étudiants, Vicky s'était lavée et habillée plus vite que d'ordinaire, espérant arriver assez tôt dans la Grande Salle pour éviter sa cousine ou encore James.

Car ces vacances ne s'étaient pas exactement déroulées comme ce qu'avait espéré, voire même prévu, Victoire : elle s'était imaginé une série de soirées étincellantes et ennivrantes jusqu'au petit matin, et ce dans les bras de Ted, loin de l'imposante échéance des ASPIC et de la présence étouffante de Jamie Chéri et ses rictus horripilants au possible. Et à vrai dire, tout s'était parfaitement bien passé... jusqu'à ce fameux réveillon familial, pendant lequel Ted avait jugé bon d'annoncer à tout le monde que lui et Vic' sortaient ensemble depuis trois ans, presque quatre.
Les coups d'oeil stupéfaits de son père, lancés sans aucune discrétion et au moins dix-huit fois par jour, les sourires chaleureux et fiers de sa mère, les gloussements moqueurs des jumelles et l'air inifférent d'Arthur, tout cela lui tappait sur le système. Sans compter les commentaires de ses grands-parents, déçus de ne pas avoir été assez perspicaces pour remarquer quoi que ce soit. Pendant toute la deuxième semaine de vacances, Vic' s'était efforcée de penser qu'après tout, leurs réactions importaient peu, qu'ils auraient déjà dû être au courant puisque James avait fait irruption dans le compartiment du Poudlard Express qu'occupait la belle juste au mauvais moment l'année précédente, et lavait réconté à tous ses cousins et cousines. Mais rien n'y faisait : elle en voulait à Ted et n'avait plus aucune nouvelle de lui depuis le 25 décembre. Abi ne lui avait été d'aucune aide, obsédée comme elle l'était par sa relation apparemment idyllique avec ce crétin de James, et même l'expérience de sa mère en ce domaine ne l'avait pas rassurée. Quant à aller se pavaner devant les Septième Année, Victoire n'y pensait plus : quel intérêt, à présent qu'elle semblait n'être plus rattachée à rien (preuve évidente de son mal-être ^^) ?

Attablée devant un demi-verre de jus de citrouille, un toast beurré précautioneusement tenu dans sa main manucurée, Victoire, pensive, espérait ne pas faire de rencontre imprévue avant une journée de cours assez remplie pour chasser ses préoccupations.

En choisissant de ne pas passer les vacances de Noël au château, Willow avait manifestement commis une grave erreur, se condamnant à de longues heures moroses passées à regarder la neige tomber derrière la fenêtre poussiéreuse d’un manoir miteux. Miteux, tel était le mot pour décrire le domaine familial qui avait perdu de sa superbe au fil des années. Rien à voir avec l’immense château qui avait accueilli nombre de sorcières et de sorciers importants, tous servis par une centaine d’elfes de maison au moins. A présent, les seuls membres de ministère à franchir le gigantesque portail rouillé étaient chargés de venir tirer chaque fois davantage de gallions à une famille criblée de dettes qui n’avait gardé qu’un vieil elfe sale et grincheux pour assurer l’entretien de toute la propriété. Autant dire que la poussière s’entassait, comme les souvenirs, et qu’il y avait là quelque chose de rageant.

On ne pouvait donc pas dire que Willow venait de passer les meilleures vacances de son existence. La nuit de noël, elle l’avait donc passée seule dans sa chambre à travailler en vue de ses ASPIC, ou plutôt à tourner les pages de ses grimmoires pour se donner bonne conscience, sans pour autant s’intéresser réellement à la métamorphose transsubstancielle ou aux propriétés de la pierre de lune. Non, elle aurait préféré davantage qu’on lui enseigne les moindres secrets du sortilège d’amnésie car dans son cas, il se serait révélé salutaire. Mais elle avait finalement renoncé à fuir, reprenant comme prévu le chemin de Poudlard, acceptant de se noyer encore quatre mois dans la masse des étudiants avant de fuir enfin, à sa majorité, peut-être à l’étranger. Quoique de toute évidence, elle trouverait un emploi au fin fond d’une galaxie lointaine que la distance la séparant de ses racines ne seraient pas suffisante !

C’est cette pensée qui arracha son premier sourire – que la majorité de la population sorcière aurait pris davantage pour une grimace mal esquissée – à Willow en ce lundi matin qui marquait la reprise des cours, des devoirs et des discours interminables sur l’importance des ASPIC. Affronter un monologue de Malefoy sur la nullité profonde de ses étudiants qu’il voyait déjà échouer lamentablement aux épreuves de potion exigeait un petit déjeuner suffisament conséquent. Aussi la jeune fille se dirigea-t-elle vers la Grande Salle, reprenant une expression qu’elle voulait de marbre. Elle était de retour dans la peau de cette élève de Serpentard prête à martyriser les plus jeunes et davantage s’ils n’étaient pas de sang pur, il fallait qu’elle se fasse à cette idée.

Etant donné l’heure plutôt matinale, la salle était presque déserte. On pouvait noter la présence de quelques premières années de Poufsouffle qui semblaient bien trop endormis pour répondre à une éventuelle provocation. Il y avait également une bande de garçons de Gryffondor profondément absorbés dans la lecture du dernier numéro du Quidditch Mag. Et, seule, à la table des Serdaigle…

-Tiens, tiens ! Weasley la Victorieuse, gardienne du nombril de l’Humanité ! railla Willow en s’avançant vers sa camarade qui semblait dépérire, son toast à la main. On dirait que tes vacances ont été aussi agréables que les miennes ! Premier de nos points communs… et dernier sans doute !

Non, décidément, ce dernier bout de toast risquait de lui faire prendre au moins dix grammes de trop, songea Victoire en reposant ladite nourriture d'un air passablement dégoûté. Les fêtes de Noël à la grand-mère Molly avaient beau être... traditionnelles, il n'en était pas moins vrai que sa famille lui jetait des regards furibons lorsqu'elle refusait une troisième part de pudding. Vicky était bien la seule dans cette famille, ses cousines Abi et Molly non incluses, à se soucier d'un éventuel surpoids causé par les fêtes de fin d'année. Il était absolument hors de question pour elle de se voir infliger le drame de toute adolescente un tant soit peu soucieuse de sa personne : la difficulté d'enfiler son jean préféré lors des week-ends à Poudlard, seuls moments de l'année qui leur permettaient de lancer des coups d'oeil aux garçons sans se sentir horriblement boudinée dans une mini jupe écossaise et bien trop longue. Ainsi donc, la belle et rousse jeune Weasley reposa son toast, but une gorgée minime de jus de citrouille afin de se prévénir de tout malaise face à l'humeur forcément redoutable du professeur Malefoy, et s'essuya la bouche avec un soin tout particulier - pas de Ted, pas de surmotivation, mais une bande de beaux Gryffondor à proximité... Razz

C'est au moment précis où la jeune fille se préparait à sortir sa trousse à maquillage de son sac, dans le but de se faire un raccord de gloss, qu'elle avisa une silhouette connue sinon familière, dangereusement proche de la table des Serdaigle. A dire vrai, Vic n'avait jamais vraiment eu affaire à l'héritière des Dolohov, et à peine connaissait-elle son prénom - quoiqu'à son avis, vu son aspect général et son absence totale de sourire, elle devait être baptisée Morticia ou Dolores. De toute manière, sa "camarade" n'était apréciée de personne au château, et quelques Serpentard eux-mêmes avaient souvent trouvé moyen de regarder ses expressions quasi-meurtrières de travers. Un jour, alors qu'elle était sortie dans le Parc au bras d'un des garçons de sa classe d'Astronomie, Victoire avait vu cette fille (en était-ce vraiment une?) parler avec l'affreuse copine de James, dont elle n'était pas sûre du nom par ailleurs (Leyer-Esmee, peut-être? Quelque chose de ridicule dans ce goût-là, en tout cas). Si la petite irlandaise avait fait amie-amie avec Gothica D., raison de plus pour ne surtout pas lui parler.

Mais malheureusement pour la jolie Victoire, l'invasion ne faisait alors que commencer : la Serpentard l'accosta sans ménagement, avec sarcasme et raillerie poussés à leur apogée. Haussant les sourcils d'un air méprisant, Vicky pinça les lèvres et toisa sa camarade des cheveux à ce qu'elle pouvait voir de la jupe de sa camarade, située de l'autre côté de la table en face d'elle. Séparés par deux couettes impeccables, ses cheveux d'un noir saisissant tirés le plus possible sur les côtés étaient toujours coupés sur son front en une frange nette et, malgré tout le mal que la fille de Fleur pouvait dire de Miss Dolohov, parfaite. Habillée de son chemisier, sa jupe écossaise et sa cravate vert et argent, cette dernière n'avait néanmoins pas l'air trop pitoyable dans son uniforme - pas autant que MachinChose Owen, en tout cas. A sa grande surprise, Victoire se surprit à penser qu'avec une autre coupe de cheveux et des vêtements beaucoup plus courts et moulants, l'héritière des Dolohov pourrait presque avoir l'air quasiment belle. Elle chassa bien vite cette pensée saugrenue de la tête avec un de ses célèbres mouvements de cheveux, puis adressa un sourire tout préparé à son interlocutrice avec ces quelques mots, prononcés sur un ton qui se voulait poli - tout sujet touchant à sa vie personnelle et à ses vacances désastreuses savamment éludé :

- Je ne pense pas qu'on ait été présentées, à vrai dire...

Durant sa courte vie – dix-sept ans révolus, à peine – Willow n’avait pas le souvenir d’avoir déjà rencontré quelqu’un dont les manies pouvaient être aussi grotesques que celles de Victoire Weasley – et Merlin savait combien elle cotoyait de personnes sortant de l’ordinaire. Elle avait tout vu : du simple sadisme à la cruauté sans bornes, de la folie à la sénélité incurable, de la niaiserie à la stupidité profonde. Mais rien de semblable ! Un mélange d’autosatisfaction et de suffisance, cette image inébranlable comme si le monde entier pouvait s’effondrer sans que la jolie rousse n’esquisse le moindre mouvement de ses ongles manucurés. Ce spectacle – balai de cheveux roux à l’appui – avait quelque chose de répugnant, à vous donner la nausée. Prenez, chers amis, le mot « répulsion », multipliez le par l’infini, ajoutez-y la profondeur de l’éternité et vous aurez encore du mal à percevoir les sentiments de la jeune Dolohov à l’égard de sa camarade de Serdaigle ! Le ton qu’employa Victoire pour lui répondre – trop poli pour être sincère - donna vie à ce tableau abject. Encore une fois, la jeune Weasley parvenait à se placer en maître, Préfète à l’écoute des autres élèves même si ceux-ci s’avèraient bien inférieurs à sa propre personne.

Dans ses moments de révolte profonde contre l’Humanité tout entière – et Merlin sait combien ces périodes étaient fréquentes – Willow s’était souvent demandé comment ramener sur terre ces gens aussi méprisables que méprisants. Son instinct de Dolohov reprenant le dessus, elle ne pouvait s’empêcher de songer à quelque moyen de ridiculiser la jeune Weasley, la blesser au plus profond de son âme de façon à ce qu’elle ne soit plus tenter de se pavaner de la sorte dans les couloirs du château. Mais le jeu n’en valait pas la chandelle. Pas vraiment. Aussi, Willow renonça-t-elle à sortir sa baguette, prenant le parti de se laisser tomber sur le banc à côté de Victoire pour mieux la fixer d’un œil mauvais.

-Dolohov, ça ne te dit rien ? répliqua-t-elle d’un ton qui se voulait froid, en tapotant fièrement le serpent argenté brodé sur sa robe. Demande à ton cher et tendre, Teddy, ça doit lui rappeller de bons souvenirs !

A peine ces mots prononcés, Willow eut un temps d’arrêt, bien qu’elle su garder un visage impassible. Elle ne savait pas exactement ce qui l’avait poussé à dire cela. Ted Lupin avait choisi la fille la plus provocante et arrogante du pays, il n’y pouvait rien, cela n’était sûrement pas une raison suffisante pour rappeller ouvertement le meurtre de ses parents. Mais Willow était à Serpentard alors… ce genre de comportement pouvait lui être pardonné, n’est-ce pas ?

-Tu n'es pas avec ton miroir sur pattes, version blonde ? demanda-t-elle innocemment. Dans la famille Delacour, je demande la cousine ! Anaëlle ? Abigaël ? Gwenaëlle, peut-être ? Qu'importe ! Elle eut un petit rire moqueur. Oh, pardon, c'est vrai qu'à présent, elle a Potter le Magnifique, deuxième du nom ! Tu deviens... secondaire ! ça doit être dur pour toi, non ? Vivre dans l'ombre d'un petit crétin vantard sans talent !

La grande Victoire Weasley était-elle détestabilisable ?

Victoire n'avait nulle envie de sympathiser avec une Serpentard, et encore moins avec la descendante des Dolohov, et ce bien qu'elle ne pût s'empêcher de toiser son interlocutrice d'un oeil expert en remplaçant mentalement son immonde uniforme par les dernières créations de chez Dior, qu'une sorcière aussi bornée que Willow ne risquait pas de connaître. Ainsi n'écoutat-elle que d'une oreille le discours de sa camarade d'Année, avec tout de même assez d'attention pour attraper son nom au vol... et celui de Ted. Avait-elle rêvé la phrase que, prise dans ses rêves de haute couture, elle n'avait entendue de très loin? Apparemment pas. A en voir l'expression faciale de Willow, la pique projetée sur le passé du jeune Lupin était parfaitement volontaire, et pour la fille de Fleur le seul souvenir du visage de Ted face aux photographies de ses parents la fit frémir. Pour qui se prenait-elle donc, avec ses grands airs et sa fierté répugnante, celle d'être fille d'assassins et reine des cachots de Poudlard?

Portant la main à la large poche de sa robe de sorcière, Victoire referma ses longs doigts soigneusement hydratés sur sa baguette, presque prête à attaquer Dolohov en public si nécessaire - de par son intelligence de Serdaigle, elle était absolument certaine de gagner n'importe quel duel contre une Serpentard bloquée dans ses préjugés et autres Sortilèges Impardonnables. Elle se ravisa néanmoins en captant du coin de l'oeil le visage concerné du Professeur McGonagall, songeant que malgré tout ce que Willow méritait elle ne pouvait pas lui faire le plaisir d'une entrave aux règles de l'Ecole. Tentant alors de se détendre, sans trop laisser sa voix trembler de colère, Vic' adressa son sourire le plus froid à l'autre en imaginant Ted débarquant dans la Grande Salle pour étriper la Serpentard à sa place :

- Je ne me vanterais pas trop des "exploits" de mes prédécesseurs, si j'étais toi, Dolohov... Si je ne m'abuse, ton père et ses petits camarades ont déjà fait la Une de la Gazette, inutile que Teddy et moi t'humiliions en public en plus du reste, tu ne crois pas?

Déstabilisée? Oui, Victoire l'était certainement - au point qu'elle en oublia de répondre aux dernières provocations de Willow, trop obnubilée par des pensées brouillées entre le passé de Ted, les déboires d'Abigaël et le visage insupportable de James Sirius Potter. Que faire, à présent, songea-t-elle, hésitant à quitter la pièce avec le plus de dignité qu'elle pourrait rassembler, pour se précipiter vers son prochain cours et tout faire pour oublier cette désastreuse mâtinée.... ?

A en juger par l'expression qu'adopta Victoire à l'évoquation de la mort tragique de Nymphadora et Remus Lupin, Willow venait de toucher un point sensible. Après sept années de sourires mielleux et de battements de cils durant les cours de potions communs aux Serdaigle et aux Serpentard, la jeune Weasley dévoilait un tout autre visage que Willow découvrait avec un mélange de surprise et de satisfaction. Ses deniers propos faisaient-ils d'elle l'actrice privilégiée d'une conversation intelligente avec Victoire Weasley en personne ? Les griffes commençaient-elles à percer les gants blancs de la demi-vélane ? Aussi curieux que cela puisse paraître, la jeune Dolohov se sentit davantage grisée que menacée par le geste qu'esquissa sa camarade de Serdaigle pour se saisir de sa baguette sous sa robe. Les menaces proférées par Victoire ne firent qu'accentuer l'hilarité de Willow qui se manifesta part un petit ricannement moqueur.

-Oho ! Y aurait-il un peu de contenance derrière la beauté plastique ? s'exclama-t-elle avec un sourire narquois avant de murmurer d'une voix douceureuse : Tu es une fille brillante, Weasley ! Alors vas-y, jette-moi un sort ! Qu'est-ce que tu attends ? Ne me dis pas que c'est la vieille McGo' qui t'effraie !

Tout à coup, Willow parut beaucoup plus sérieuse. Joignant le geste à la parole, elle extirpa elle-même sa baguette, prenant soin de la garder sous la table, à l'abris des regards. Pourtant, elle ne comptait pas s'en servir. Elle voulait seulement provoquer Victoire et si celle-c décidait réellement de se servir de sa baguette, alors la jeune Dolohov ne ferait que payer le juste prix pour avoir hérité de cet ignoble nom.

-Tu n'as aucune prise sur moi, Weasley ! Je ne suis pas de ces premières années que tu rabaisses d'un simple regard. Et tu peux mépriser mon nom et ma famille : je connais suffisament de sorts pour te faire regretter de ne penser qu'à toi et à la meilleure façon d'humilier les autres ! Et crois-moi, cela relève d'une forme de magie qui dépasse tout ce que tu pourrais imaginer...

En réalité, Willow n'avait pas de connaissances spécifiques en matière de magie noire ! Mais les situations critiques telle que celle-ci lui donnait des ailes : elle avait là une occasion unique de faire craquer cette peste de Victoire Weasley et de la forcer à ravaler sa fierté : elle n'allait pas s'en priver !

-Tu ressembles plus à cet idiot de Potter que tu ne veux bien l'admettre ! siffla la jeune Serpentard. Tu comptes dans ta famille plus de héros que tous les autres élèves réunis. Alors forcément, tu te sens l'âme justicière parce que depuis quelques minutes, tout ce qui parvient à ton oreille - Willow se pencha légèrement vers Victoire - ce sont les gémissements de ton cher Teddy qui appelle son père dans ses pires cauchemars ! Avoue-le Weasley ! Avoue que tu as un semblant de coeur derrière tes manies de petite française arrogante des quartiers huppés de Paris ! Avoue que tu as envie de me cracher au visage tous les sorts que tu as pu apprendre dans ce maudit château parce que mon père a fait exploser Remus Lupin ! Boum ! murmura-t-elle à l'oreille de la jeune Weasley avant d'éclater d'un rire froid.

Sentant le rouge lui monter aux joues, Victoire tenta tant bien que mal d'ignorer le geste de Willow, selon toute évidence bien décidée à provoquer la fille de Fleur jusqu'à sa perte de contrôle totale. Or, Victoire Weasley était assez bien placée pour savoir qu'avec une famille comme la sienne, elle ne pourrat certes pas faire passer un quelconque débordement pour un accident auprès de Minerva McGonagall. Aussi se mordit-elle la lèvre jusqu'à sentir un goût âcre voiler celui des pastilles de menthe dont elle raffolait tant.

Comment alors remettre l'héritière des Dolohov à sa place sans pour autant se consumer de rage, lancer un Sortilège Impardonnable, éclater en sanglots hystériques en lui lançant le plat de Porridge en plein visage... ? En fin de compte, peut-être que la meilleure arme pour contrer les attaques venimeuses de Willow Dolohov était celle du miroir verbal.
Ainsi s'apprêta-t-elle à lancer ses pires piques à Willow... lorsque celle-ci, dans un tourbillon de haine, de mépris et de cruauté abyssales, se pencha vers Victoire, faisant remonter en elle tous les souvenirs plus que pénibles d'un Ted Lupin tournant et retournant dans son lit en marmonnant des syllabes paniquées, alors même qu'ils n'étaient qu'enfants. La seule vision du jeune homme plongé dans de noies réflexions chaque année, lorsqu'il visitait la tombe de Remus et Nymphadora, lui était insupportable. Sentant alors une rage intarissable l'envahir, Victoire se leva soudain, faisant valser sa chaise et provocant l'arrêt de plusieurs conversations autour d'elles. La voix déformée par la haine, elle se dressa de toute sa hauteur et planta ses yeux gris, inhabituellement glacés, dans ceux de Willow Dolohov.

- C'est difficile, n'est ce pas, de ne devoir s'appuyer que sur la gloire de ses parents parce qu'on est incapable de suivre ne serait-ce que la moitié de leurs traces ? Combien de fois t'es-tu appuyée sur leurs actes pour pouvoir te faire un semblant de place au milieu de tes semblables, Dolohov ? Toi qui, si tu te trouvais en face de leurs victimes, serais soudainement dans l'incapacité la plus noire de glorifier les meurtres indicibles de tes géniteurs ? C'est facile, n'est ce pas, de prétendre tout savoir en matière d'Avada Kedavra quand on laisse les autres moisir à sa place à Azkaban !

Victoire reprit son souffle, puis poursuivit, la gorge sèche et la voix de plus en plus basse, jusqu'à n'être plus qu'un sinueux murmure :

- Ma famille est peut-être peuplée de héros en tous genres, et on est plus narcissiques les uns que les autres, Dolohov... Mais je n'irai pas te cracher mon venin au visage, parce que j'en connais les causes et les conséquences. Bloquée comme tu l'es dans ton petit univers frigide, aseptisé par des années de conservationisme à en vomir, tu ne risques pas de parvenir à une quelconque forme de vie, défraîchie que tu es par le poids de ton héritage... Tu as explosé en même temps que tous les autres, n'est ce pas ? Tu as perdu tout ce qui ressemblait de près ou de loin au concept de famille, et ce à cause des résistants...

Lorsque Victoire repoussa brusquement sa chaise pour se dresser de toute sa hauteur face à Willow, la gratifiant d’une froideur jusque là jamais vu au fond son regard gris, la Serpentard comprit que cette conversation risquait de prendre une tournure intéressante. Par ce geste, la jeune Weasley venait de la rassurer sur un point : elle ne comptait pas mettre un terme à cet échange en se retirant dans sa salle commune. A présent, un duel verbal s’était installé entre les deux étudiantes et tous les coups étaient permis. L’objectif ultime semblait être de blesser l’autre au plus profond de son être et ce même si les masques du quotidien devaient se trouver fissurés ! Le masque de Victoire, lui, se trouvait déjà bien malmené ! Willow ne se souvenait pas de l’avoir déjà vu dans un tel état de rage et ce malgré les septs années d’études communes qu’elles avaient à leur actif. Et à vrai dire, la jeune Dolohov préférait de loin cet aspect jusqu’à lors insoupçonné de la personnalité de la Serdaigle. Derrière son masque d’égocentrisme, Victoire apparaissait en définitive comme une jeune fille particulièrement intelligente et sincèrement attachée à Ted Lupin pour qui elle délassait la futilité que tout le monde lui connaissait afin de mieux prendre sa défense. Dans cette subtile analyse, quelque chose laissait tout de même Willow perplexe : pourquoi s’obstiner à refouler au fond de soi et à masquer de tant de défauts cet élan d’humanité ?

La jeune Dolohov n’eut pas le loisir de s’attarder davantage sur cette question des plus intéressantes. En effet, Victoire venait de lancer une contre-attaque dont la violence surprit quelque peu Willow. Elle n’aurait jamais soupçonné un tel répondant ! Malgré tout, elle tenta de rester impassible. Si elle avait été noyée dans la masse que représentait les Serpentard – et dont Scorpius Malefoy était incontestablement le leadeur – la jeune Dolohov aurait probablement été contrainte d’admettre la véracité des propos de sa camarade. Ce que la jeune Weasley ne semblait pas comprendre, cependant, c’était la profonde indifférence que Willow réservait à sa famille, à la pureté de son sang et à la guerre durant laquelle ses ancêtres avaient tout perdu. Pivotant légèrement sur le banc pour faire face à Victoire, la Serpentard appuya négligemment son coude sur la table, soutenant sa tête et fixant son interlocutrice d’un œil vitreux qui se voulait le témoin d’un ennui profond. Néanmoins, elle prit la peine de formuler une réponse.

-Vous m’amusez beaucoup toi et ta famille de traîtres à leur sang ! s’exclama-t-elle, un rictus déplaisant vissé au coin des lèvres. Vous semblez persuadés de détenir la vérité en tout point, le modèle d’une famille unie et soudée ! Mais, vois-tu, je ne crois pas me tromper en m’estimant plus proche de mon elfe de maison que tu sembles l’être de tes frères et sœurs ou encore de ton idiot de cousin ! D’un côté, je te comprends, Weasley. Ils sont tellement… stupides… puérils… Totalement indignes de ton intérêt, n’est-ce pas ? Il est tellement dommage que l’image d’une personne aussi brillante et importante que toi se trouve ternie par des individus aussi grotesques qu’il te faut pourtant reconnaître comme des membres de ta famille, n’est-ce pas ? Pauvre Vicky ![/

[color=indigo]Eclatant d’un grand rire, Willow détourna son attention quelques secondes, faisant mine de s’intéresser à un pancake à l’aspect douteux qu’elle s’empressa de reposer non sans une grimace de dégoût. Elle finit par reprendre :

-Je me fiche éperdumment de ma famille et ce qui pourrait leur arriver. Je me fiche tout autant de tout ce qu’on a perdu et je n’ai aucune prétention quant à l’attitude que je pourrais bien adopter face aux victimes de mon père. J’ai choisis mon camp et depuis bien longtemps. On ne peut avoir confiance en personne, j’ai pris le parti de détester et de mépriser tout le monde et par certains côtés, tu te comportes de la même façon ! s’exclama-t-elle en défiant Victoire du regard de lui démontrer le contraire. Si les ténèbres devaient nous envahir de nouveau, crois-moi que je n’en serai pas à l’origine ! Néanmoins, je serai curieuse de savoir comment toi et tes petits copains vous y prendriez pour empêcher cela ! Parce que cela ne suffit pas d’être le symbole vivant de la fin de la guerre de part sa naissance et son prénom, Weasley ! Tes parents, tes oncles et tes tantes étaient des sorciers brillants et leurs qualités premières étaient probablement leur dévouement et leur humilité ! Mais quand je vous vois, toi et tes idiots de cousins, vous déchirer chaque jour davantage, je me dis que vous vous êtes construits sur de vulgaires prétentions qui ne vous sauveront pas lorsque ce sera à vous de faire vos preuves !

Esquissant un sourire narquois, Willow rajouta :

-Alors à ton avis, qui de nous deux est la plus défraîchie par le point de son héritage ?

Journaliste Nombre de messages : 234 Age : 31 Date d'inscription : 27/12/2007

Les vacances de Noël avaient pris des tournures compliquées que personne n’avait vraiment pu maîtriser. Le point de départ de tout cela avait été ce fameux repas de noël chez les Weasley, où Gabrielle et Abigaël Delacour avaient été conviées ce qui avait hautement ravi cette dernière. Le repas légèrement mouvementé avait rassemblé tous les Weasley, ce qui avait crée une ambiance particulièrement décontractée. Dans les premiers temps, les choses paraissaient prendre une bonne voix : Abigaël tendue et gênée comme ce n’était pas possible s’était assise à coté de James au plaisir des deux étudiants. De plus Victoire et Ted étaient venus s’installer prés d’eux. La relation Victoire/Ted paraissait être inconnue du reste de la famille, mais Victoire ne semblait pas vraiment être prête à l’annonce, ce qui n’était pas forcément le cas du jeune Lupin.
L’annonce de l’agrandissement de la famille Weasley avait fait exploser le bonheur de toute l’assemblée et Ted avait trouvé bon de faire son annonce à ce moment précis. Abigaël avait été aussi surprise que Victoire : quoiqu’était-ce possible ? Les choses s’étaient enchaînés tellement vite qu’ils avaient échappés au contrôle de la cousine de la jeune Delacour. Abi avait bien tenté de se pencher vers la jeune rouquine pour lui glisser une ou deux phrases gentilles et réconfortante, mais qu’était-elle sensée dire ? Peut être rien...

Après cet épisode mouvementé qui ne risquait de ne jamais quitté la mémoire d’Abigaël, elle avait essayé de revoir Victoire aussi souvent que possible, mais Gabrielle, sa mère, lui demandait toujours de l’accompagné partout où elle allait. Abi avait voulu dire non, mais cette petite semaine rimait avec l’unique semaine de vacances que Gabrielle Delacour avait prise pour les vacances d’hiver afin de la passer avec son enfant. La Serdaigle pouvait-elle décliner à chaque fois l’offre de sa mère ? Elle avait bien essayé à différentes reprises d’emmener sa mère à aller voir sa propre sœur ainsi pouvant passer une courte après-midi au coté de Victoire. Mais les occasions avaient été rares et les vacances avaient vite touchées à leur fin obligeant tous les sorciers anglais à reprendre le chemin de la gare pour prendre le Poudlard Express. Abigaël avait espéré passer ce voyage en compagnie de sa cousine, mais étant donné que la jeune Delacour était arrivé tard dans le train, elle n’avait pas osé s’enfoncer trop loin dans les wagons de peur de ne plus trouver de compartiment vide où s’asseoir. Elle s’était donc assise seule dans l’un des premiers compartiments vide qu’elle avait trouvé après être passer devant une dizaine.

Les premiers heures passés dans la vielle baptise avaient tentés de rimer avec une sorte tentative de discussions sérieuse avec Victoire pour la fille de Gabrielle, mais ses obligations de rédactrice du journal avait fait tomber à l’eau son plan. Et elle ne fut de retour dans le dortoir des Serdaigle que tard et à cette heure, Abi préféra une discussion normale avec sa cousine plutôt qu’autre chose préférant laisser une nuit à son cerveau.
Lorsque la jeune Serdaigle ouvrit les yeux en ce froid lundi matin, elle tourna la tête vers le lit de sa cousine pour le voir vide. Espérant ne l’avoir raté que de peu, elle se leva et partit s’habiller aussi vite qu’elle put. Voyant les articles de son journal entassés sur son sac en bandoulière, elle poussa un long soupir avant de se dire qu’elle ferait tout cela plus tard, ou en tout cas après avoir mis quelques aliments dans son estomac vide. Descendant les escaliers d’un pas rapide, elle entra dans la Grande Salle au trois quart vide. Elle allait s’asseoir sur le longue table des Serdaigle lorsqu’elle voit familière lui vint à l’oreille. Victoire ? Relevant son regard océan sur l’autre extrémité de la table des Serdaigle, elle vit sa cousine et une autre étudiante qui d’après les couleurs de sa cravate appartenait à Serpentard. De cette dernière, Abigaël ne vit que le dos, mais le ton qu’avait pris sa cousine pour lui parler était différent de ce qu’elle entendait d’habitude dans la bouche de la rouquine. La Delacour n’avait jamais entendu Victoire s’énerver et l’inconnue de dos devait avoir touché la corde sensible pour faire sortir la Victoire Weasley en colère. Voyant que la conversation commençait, ou plutôt continuer à rendre Victoire triste, Abigaël s’avança d’un pas rapide vers les deux étudiants. Et sans mots, elle commença à attraper le bras de Victoire afin qu’elle se lève pour la suivre. Plongeant ses yeux dans ceux de sa cousine, elle esquissa un coup de tête, espérant qu’elle avait compris, puis laissant Victoire se levait du long banc, Abi se tourna vers la Serpentard. Quand Victoire se trouva debout au coté de la jeune Serdaigle, Abigaël passa son bras autour de celui de Victoire, et sans mot dire pour l’inconnue, elle la détourna et avança vers la Grande Porte. Se penchant doucement vers sa cousine, Abigaël lui chuchota dans sa langue maternelle.

-Est-ce que ça va, Vic’ ?